Oui, bien sûr, il reconnaissait avoir été frappé par le climat d’étrangeté qui régnait depuis son arrivée, mais il avait mis la bizarrerie des habitants sur le compte du rapt traumatisant de la Montagne, de cette pénible menace de vente du massif. Il s’était obstiné, car il n’imaginait pas, en dégainant ses stylos, tomber dans un western. Jamais une enquête sur l’émergence ou la résistance d’une culture ne l’avait conduit au poste de police.

Une montagne surplombe Saillans, village de Drôme, avec une telle majesté qu’aucun habitant des siècles passés, des temps présents, n’a pu échapper à sa domination. Elle est le génie tutélaire du pays. Ce massif a pour nom « les Trois Becs », mais tout le monde, depuis toujours, l’appelle la Roche.

Un écrivain-voyageur, connu sous le nom de Monsieur Lion, débarque à Saillans, alerté par cette relation étrange entre une montagne au port royal et ses sujets. Il se propose d’écrire un feuilleton littéraire pour un grand quotidien. Le premier épisode doit paraître dix jours après son arrivée… Mais, justement, le jour de son arrivée, Lion apprend que la Roche est à vendre, que la Montagne sera désormais terrain clos, parc de loisirs réservés…

Douze habitants en colère, réunis de nuit dans un hôtel désaffecté, lui font part de leur absolue détermination à entrer en résistance. Ils promettent de lui fournir toute la matière nécessaire à son enquête, un à un, jour après jour. Car écrire, c’est déjà résister. Mais, dès la parution du premier épisode du feuilleton, les informateurs de l’écrivain disparaissent un à un, jour après jour. L’étau se resserre autour de Monsieur Lion, lui même menacé par de peu scrupuleux mercenaires.

« Prise de Becs » est un roman policier ethnographique, un ethno-polar particulièrement original. Car il est le résultat d’une active collaboration entre la population d’une commune et un écrivain. Une expérience rare.